Si vous essayez d’apprendre le breton ou que vous suivez notre compte Instagram, vous avez déjà vu passer des mots avec ce fameux n surmonté d’une petite vague, le n tildé. Et pourtant, rien à voir avec l’espagnol. Aujourd’hui, nous allons découvrir l’origine de cette lettre et surtout comment prononcer ce ñ en breton.
Le ñ : le n tildé
L’origine du ñ en breton : le n tildé
L’alphabet breton ne compte pas 26 lettres comme notre alphabet français. En effet, il y a des lettres inexistantes et des lettres spécifiques. On peut bien sûr citer notre fameux ñ ou même le c’h en breton, qui vous a peut-être joué des tours lorsque vous avez essayé de prononcer yec’hed mat ou Penmarc’h la première fois.
Revenons à notre n tildé. Tout d’abord, oubliez tout ce que vous savez de lui en espagnol ! D’ailleurs le “tilde” est le terme hispanique qui s’est généralisé, mais en français, on devrait parler de “tiltre”. L’usage du ñ en breton a évolué au fil des siècles. Abréviation, signe du doublement du n, prononciation à l’espagnol “gn”. Finalement, c’est au début du 20e siècle que le ñ breton prend son utilisation actuelle : la nasalisation des voyelles.
Ces évolutions du ñ vont de pair avec l’évolution de la langue bretonne, ou devrions-nous dire des langues bretonnes. En effet, la volonté d’unification entre les dialectes (cornouaillais, léonard puis trégorois) et de simplification de l’orthographe du breton au fil du temps ont participé à ce changement dans les usages du ñ.
Les autres langues avec un ñ
Outre le breton, vous savez certainement que ce ñ est principalement observé en espagnol. Il permet d’indiquer le son “gn”, comme dans “oignon” ou “mignon”. Par exemple, le fameux “Feliz cumpleaños” qui signifie “Bon anniversaire”.
D’autres langues possèdent ce n tildé. On peut citer le basque, mais aussi diverses langues africaines (hassanya, karone, wamey, wolof…).
Prononcer le ñ en breton
Passons maintenant à la leçon : prononcer le ñ en breton. Que signifie concrètement la nasalisation des voyelles que nous évoquions précédemment ? Il s’agit de produire un son différent lorsqu’une voyelle est suivie d’une consonne nasale (n et m en français). Pour les voyelles A, E, I et O la nasalisation correspond au fait de prononcer les mots comme “dans”, “flan”, “prend”, “fin”, “pont”, etc.
Finalement, le ñ en breton permet de distinguer cette prononciation muette du n classique. Quand il n’y a pas de tildé, le n se prononce, comme en français dans le mot “âne”. On peut prendre deux exemples précis pour bien comprendre.
- On distingue “amann” [ã’mãn], comme dans kouign-amann, qui signifie beurre, le n se prononce, et “amañ” [‘ãmã], à prononcer avec le son “an”, qui signifie “ici”
- On distingue également “gouelan” [gwelɑ̃n] (goéland) avec le son “n” et “gouelañ” [gwelɑ̃] (pleurer) avec le son “an”.
Ce n tildé en breton est très commun. On le trouve dans des verbes, par exemple :
- être : bezañ
- manger : debriñ
- peindre : livañ
- voyager : beajiñ
- étudier : studiañ
Mais aussi au superlatif, qui est construit en ajoutant le suffixe -añ :
- le plus grand : brasañ
- le plus beau : bravãn
- le plus jeune : yaouankãn
- le plus courageux : kalonekañ
On peut également le retrouver le ñ dans des prénoms bretons, notamment le prénom Fañch ! Belle transition pour la suite.
Le ñ dans la langue française : l’affaire Fañch
Pour finir, pourquoi le ñ breton a tant fait parler de lui ces dernières années, en Bretagne et au-delà ? Pour cela, il faut se tourner du côté des signes dits diacritiques : les points, les cédilles, les accents. Ce tildé n’est pas reconnu comme signe diacritique de la langue française, et c’est sur ce point que tout commence.
En effet, depuis la circulaire Taubira en 2014, les signes diacritiques non connus de la langue française ne peuvent pas être utilisés dans l’état civil. En résumé, un prénom avec un tildé ne peut être enregistré à l’état civil. Et le parfait exemple, c’est l’affaire Fañch !
De 2017 à 2019, un couple de Quimpérois s’est opposé à la justice française par rapport au prénom de leur fils : Fañch. L’affaire va jusqu’en cassation où l’enfant est finalement autorisé à conserver son prénom sous sa forme bretonne traditionnelle. Plus récemment, en 2023, un autre petit Fañch né à Angers a fait parler de lui. Cette médiatisation du ñ breton l’a fait devenir un véritable marqueur identitaire de la langue bretonne. De nombreux bretonnants se sont appuyés sur cette histoire pour exprimer l’importance de cultiver et transmettre le breton.
En 2023, la ville de Landerneau a fait installer une sculpture de ñ géant pour symboliser cette importance de la langue bretonne.
Alors, prêt à apprendre de nouveaux mots et savoir comment les prononcer ? Mais le ñ en breton ne suffira peut-être pas, vous pouvez alors apprendre à prononcer le breton de manière plus globale. Pour avoir les bases, être compris des bretonnants, ou pour impressionner vos proches !