Entretien exclusif avec Matmatah : nos rockeurs Bretons sont de retour !

Culture Entretien exclusif avec Matmatah : nos rockeurs Bretons sont de retour ! crédit photo - © Julien Banes

Après une séparation de près de 10 ans, Matmatah s’est reformé pour notre plus grand plaisir ainsi que celui de nos oreilles. De retour avec un opus rock et prononcé, Plates Coutures, le groupe s’offre une belle tournée française et internationale.

Port d’Attache a pu rencontrer Eric Digaire, le bassiste et Benoît (Scholl) Fournier le batteur, qui ont accepté de nous accorder quelques heures de leur temps. Quand on vous dit qu’on a eu de la chance, c’est vrai, le lendemain de la rencontre, Eric et Scholl s’en allaient pour Paris pour continuer leur promo et leur tournée avec leurs deux autres camarades : Tristan (Stan) Nihouarn le chanteur et Emmanuel (Manu) Baroux le guitariste.

Rendez-vous au Tapecul, Plougastel-Daoulas !

C’est Eric qui nous a donné rendez-vous à Plougastel, au Tapecul sur Lauberlac’h. Rassurez-vous, les chaises étaient plutôt confortables. L’endroit offrait un cadre magnifique et cossu : mélange parfait pour se rencontrer autour d’un verre.

C’est donc dans une ambiance détendue, rieuse et conviviale qu’on a pu discuter et échanger librement, en toute simplicité.

Scholl est arrivé le premier et on en a profité pour lui demander ce qui l’avait attiré en Bretagne. Parce que oui, il faut savoir que Scholl nous vient de Marseille ! Savez-vous ce qu’il nous a répondu ? Les crêpes et les paysages bretons. Même si ça paraît crédible, en réalité c’est par la musique et les rencontres qu’il a atterri en Bretagne. Heureux hasard, car il a pu ainsi connaître les membres de Matmatah et intégrer le groupe en 2002 après le départ de l’ancien batteur [ndlr : Jean-François Paillard].

Si vous avez une mémoire passoire, été mauvais élève ou même été cryogénisé entre 1998 et 2017, laissez-nous vous remémorer qui est Matmatah.

Si tu cherches un peu de gaieté…

A l’origine du projet Matmatah, il y a Tristan Nihouarn, le chanteur Brestois à la voix si singulière. A la recherche de musiciens pour un concert en 1998, Tristan rencontre Eric dans un bar et lui propose de faire partie de son groupe. Eric accepte et deux jours plus tard, les voilà sur la scène de l’un des bars de Brest.

Le premier album de Matmatah, La Ouache, arrive peu après. Un succès incroyable qui va propulser le groupe et ses membres sur le devant de la scène rock bretonne et française. Ils vont ainsi s’inscrire ainsi dans les esprits de toute une génération. Vous vous souvenez certainement des titres tels que L’Apologie, Lambé An Dro, ou Au Conditionnel.

Si cela ne vous dit rien : où étiez-vous passés depuis 1998 ?

Matmatah va ensuite produire trois autres albums : Rebelote en 2001, Archi Kramer en 2004 et La Cerise en 2007. Malgré les succès, le groupe annonce sa séparation en 2008. Le single Bande A Part l’énonce clairement et avec celui-ci, Matmatah boucle son ceinturon, ou termine sa bolée pour utiliser une expression plus locale.

Courant 2015, un coffret-album de Matmatah voit le jour : Antaology, réunissant tous les succès du groupe sur deux CD et grâce à lui, Matmatah s’est reformé. Pourquoi ? On leur a posé la question.

Rencontre et simplicité

Au Tapecul, l’ambiance était cubaine, pas très cohérent pour la rencontre, mais on ne choisit pas toujours la musique des troquets. Autour d’une table en bois, on avait chacun un verre. Parler donne soif, voyez-vous. Allez, c’est notre tournée, c’est pour nous, découvrez notre petit entretien avec Matmatah !

Tout d’abord, pourquoi le groupe s’appelle Matmatah ?

Eric : Matmatah est un nom de village troglodyte en Tunisie. Cela ne signifie rien de manière personnelle, mais nous voulions un nom qui se prononcerait de la même manière dans toutes les langues. Nous ne voulions pas non plus un nom de groupe éponyme ou qui commencerait par ‘Les’. Alors quand on cherchait et que Tristan nous a proposé Matmatah, on est tous tombés d’accord.

Créer en groupe peut s’avérer compliqué, comment se débrouille Matmatah ?

Scholl : Généralement, on se retrouvait avec une mélodie, des paroles ou juste un riff qu’il nous suffisait de partager avec les autres. Ensuite, c’est à celui que ça inspire pour la suite du morceau. Si morceau il y a.

Eric : Oui, quand tu écris une chanson, soit c’est un mort-né, soit la chanson elle te regarde et elle décide seule de ce qu’elle va devenir. Pour Entre Les Lignes, j’avais le refrain qui me trottait en tête depuis quelques jours et quand je l’ai montré à Stan, il a planché et on a monté le reste comme ça. C’est moi qui la chante car le plus souvent, celui qui écrit est celui qui chante.

Certaines chansons de vos précédents albums sont en anglais (Out, Radio Edit), était-ce une volonté de s’exporter ?

Eric : Pas du tout, mais certaines choses se disent plus facilement, plus directement, en anglais qu’en français.

Scholl : On considère que la langue est un instrument de musique à part entière. Le français et l’anglais ne se chantent pas pareil et puis on en avait envie. Pour autant, on n’a pas cherché non plus à faire de l’export.

Comment vivez-vous vos concerts ?

Eric : Quand on fait des festivals comme les Vieilles Charrues par exemple, on essaye de jouer à un horaire où il fait encore jour, simplement pour voir le public. Le concert devient donc un spectacle partagé sur un nouveau plan : le public nous voit et nous le voyons à notre tour. C’est bien plus plaisant que lorsque l’on joue de nuit, où au final on ne voit qu’une masse noire et où l’on doit jouer en se prenant des projecteurs un peu partout. Il y a aussi certaines chansons qui appartiennent au public, on n’en est plus maîtres. On a du plaisir à les jouer, mais c’est surtout le public qui les rend vivantes.

Comment vous est venue l’idée de repartir sur un nouvel opus ?

Eric : Au moment où l’on a sorti le coffret Antaology en 2015, l’idée est arrivée sur la table, comme ça. On y a tous pas mal réfléchi et on a décidé de repasser du temps ensemble pour vérifier notre compatibilité, on avait quand même tous nos vies à côté, la famille ou les projets solo [ndlr : Tristan Nihouarn a produit deux albums en solo durant l’arrêt de Matmatah]. Alors on est tous allé au Maroc, en terrain neutre en fait. Surtout pour réapprendre à passer du temps ensemble, à créer ensemble. Ca s’est bien passé, alors on s’est lancé, on a commencé à bosser tous les quatre. Au retour du Maroc, on avait 28 titres potentiels.

La chanson « Entre Les Lignes » marque une pause rythmique au milieu de l’album, pourquoi ?

Eric : C’est tout simple. Plus jeunes on a connu les vinyls, avec leurs deux faces et marquer une pause sur un album d’aujourd’hui nous paraissait évident à faire. Comme s’il avait deux faces lui aussi.

Les thèmes abordés sur Plates Coutures (Nous y sommes, Petite Frappe, Overcom…) sont relatifs à la société et plus graves, cela a-t-il une signification ?

Eric : Il faut se rendre compte quand même qu’entre 2008 et 2015, on a vécu et on a bien changé, on a mûri. Il faut vivre des choses aussi, pour pouvoir les raconter. Nous sommes des quadras, témoins de la société dans laquelle ils vivent. L’époque dans laquelle nous sommes est plus grave, il se passe beaucoup plus de choses, que ce soit au niveau national ou international…

Scholl :  Nous avons commencé à préparer l’album en 2015,  alors le lien qu’on peut faire entre “Marée Haute” et les événements politiques récents est dû au hasard, on n’a pas du tout fait exprès. Il reste que le sujet évoqué est actuel. De toute façon, il faut avoir un message pour que les gens t’écoutent, sinon ça passe à la trappe et ça fait du commercial.

Ils battent le tempo à Plates Coutures !

Il vaut mieux bien le battre en concert, ce tempo, sinon c’est fausses notes et compagnie. Eric nous a dévoilé, d’un air taquin, que parfois ça arrivait que Scholl rate un charley, un des éléments qui composent la batterie, mais ça, vous ne le répétez pas, d’accord ?

Matmatah, il me semblerait bien que je vous aime

Vous pourrez donc retrouver Matmatah sur scène à travers toute la France. Leur dernière date est en décembre à Plougastel, alors d’ici là, vous aurez l’occasion de les croiser aux Vieilles Charrues de Carhaix, ou même à la Fête du Bruit de Landerneau. Ils seront présents partout, alors s’ils passent près de chez vous, n’hésitez pas, allez-y. Voir (ou revoir) Matmatah sur scène, c’est comme manger de nouveau les crêpes que votre mamie faisait quand vous étiez gamin. Ça fait du bien.

Le saviez-vous ?

Le bar Tapecul s’appelle ainsi pour marquer son attachement au monde maritime ! En effet, un Tapecul est une des voiles présentes sur un voilier. Attachée à l’arrière, elle dépasse souvent du fait de sa taille. Alors brisons ici tout faux-semblants : ce troquet ne se nomme pas Tapecul parce que ses chaises ne sont pas confortables !

Je mange le beurre au couteau et en dépit des années passées loin de la France, je reste très attachée à mon Finistère. Un peu chauvine sur les bords, j'aime l'idée de montrer ma région sous un angle différent et je me base sur une philosophie : nul besoin d'ouvrir les yeux pour voir le monde autrement, il suffit d'ouvrir son esprit.
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Briec
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